A Nassau, l'alcool coulait toujours plus ou moins à flot. En fonction des arrivages, des rançonnages, des abordages, et des filières, aussi, la qualité était là, ou pas. Les saveurs pouvaient tout aussi bien vous ravir le palais que vous donnez envie de rendre vos tripes sans forcément passer par la case "faisons ça dehors". Si un bon nombre de personnes n'en avaient strictement rien à faire, pour cause de palais totalement anesthésié, sans doute, ou de dépendance à l'alcool bien trop imposante pour se permettre de faire la fine bouche (et c'était bien le cas de le dire !), d'autres, en revanche, préféraient éviter la piquette et l'eau de vie. Oui, parfois, on a l'impression de boire de l'eau de vie, qui vous brûle tout entier, et qui vous laisse avec des maux de ventre pendant plusieurs jours. D'une certaine façon, il y avait, ici, des palais suffisamment développés pour savoir reconnaître les meilleurs alcools, et donc les proposer au prix fort. Et, évidemment, on retrouve souvent ces génies du palais parmi les commerçants en vin, les taverniers, et toute autre profession qui pourrait faire son commerce d'une connaissance de ce genre. Mais, parfois, en des fêtes comme celle-ci, on prêtait moins attention à ce que l'on buvait, parce que, vous comprenez, c'est la fête, et qu'il est préférable de ne pas se montrer trop pointilleux au risque de se retrouver sans rien du tout à boire ou à biberonner. Ankaa était de la partie, bien sûr. Elle n'allait tout de même pas se tenir à l'écart quand il y avait des festivités. Plus ça boit, plus ça parle, et c'est d'autant plus intéressant lorsque la langue qui se délie appartient à un pirate, ou à un marchand. Et puis, on célébrait les 10 ans de Nassau, et, liée comme elle était à cette ville, bien que, techniquement, elle ait été conçue sur le territoire de la ville l'ayant précédée, la pirate ne pouvait pas faire l'impasse.

Là, tout ce qui importait à Ankaa, tout en tenant tout précieusement contre elle la bouteille qu'elle avait piqué à elle ne savait plus trop qui, c'était de trouver des genoux accueillants, pour s'y poser, et un torse contre lequel la moindre de ses courbes se fonderait parfaitement. Elle voulait des câlins, de l'affection, du calme, aussi. Juste ça. Et puis, elle voulait aussi rire et plaisanter, comme une enfant, prendre soin de la personne auprès d'elle, aussi. Mais elle ne voulait pas se faire vomir dessus, ni se retrouver auprès de quelqu'un qui puait, ou qui n'avait plus de dents. Ou qui avait les mains sales. Elle soupirait, et laissait son regard retomber, un instant, vers son corset, quelque peu relâché, qui libérait quelque peu les courbes de sa poitrine. Une poitrine contre laquelle appuyait quelque peu le goulot de sa bouteille. Et puis, elle repéra une silhouette connue, vers laquelle elle ne manqua dès lors pas de se diriger. Son capitaine. Avec lui, il ne lui arriverait rien, c'était sûr, parce qu'il n'y avait aucune tension de quelque sorte entre eux. Écartant les bras, dont une main tenant sa bouteille, éborgnant quelqu'un au passage, très probablement, Ankaa esquissa le plus doux des sourires, ses yeux pétillants d'une malice affectueuse.

« Cap'tain Risley ! Je peux m'asseoir sur vos genoux ? J'ai mal aux pieds à force de marcher, et mes fesses ont besoin de repos, les mains sont bien baladeuses ce soir ... » Une moue un peu chiffonnée pris place sur ses traits, alors qu'elle finissait son approche, se postant devant lui, avec des grands yeux attendrissants.